Cette huile sur toile représente un détail du célèbre tableau de Girodet, Les funérailles d’Atala (ou Atala au tombeau), exposé au Salon de 1808 et illustrant le premier roman de Chateaubriand paru en 1801.
Anne-Louis Girodet-Trioson (Montargis, 1767 – Paris, 1824). Atala. Vers 1808. Peinture à l’huile sur toile. H. 0,49 x L. 0,60 cm. Inv. 2013.8.1
Exposé dans le cabinet Girodet
Ce tableau, au sujet duquel Baudelaire écrivit longtemps après « L’Atala de Girodet est, quoi qu’en pensent certains farceurs qui seront tout à l’heure bien vieux, un drame de beaucoup supérieur à une foule de fadaises modernes innommables. », fut acquis par le Musée royal en 1819 et exposée aux Tuileries sur ordre de Louis XVIII. Il est aujourd’hui conservé au musée du Louvre.
La composition montrant la tête et le buste d'Atala soutenus par le Père Aubry, dont on ne voit que les mains et une partie du vêtement, est à peu près au format du détail original dans l’œuvre définitive. La haute qualité de la facture, en légers glacis superposés, la sûreté de la touche, les parties laissées en réserve confirment l’attribution de ce fragment à Girodet lui-même, ainsi que le mentionne son cadre en bois et stuc doré d’époque Restauration.
D’après la spécialiste de Girodet, Sidonie Lemeux-Fraitot, Atala peut être identifié au n° 192 de l’inventaire après décès de l’hôtel particulier parisien du peintre, une « étude de M. Girodet d’Attala [sic]» qui était accrochée dans le corridor du 1er étage. Probable étude pour l’œuvre du Salon de 1808, conservée par le peintre pour devenir tableau de chevalet ou réplique partielle autographe, elle figurait en bonne place à son domicile auprès d’un autre fragment du même tableau, le Chactas (Inv. 2016.3.1) [+ lien], entré lui aussi dans les collections de la Maison de Chateaubriand en 2016.
On ignore quand et comment ce fragment intégra la collection royale, l’historique est attesté en revanche à partir de la Monarchie de Juillet. L’encadrement et le châssis d’origine présentent la particularité de porter trois fois au dos la marque au fer de Louis-Philippe (LPO couronné) et sur le devant, inscrite sur la baguette supérieure, la mention « donné par le roi ». Ayant appartenu à Louis-Philippe, puis offert par le roi des Français à son ministre des Finances, Jean-Pierre Joseph Lacave-Laplagne (ministre du 15 avril 1837 au 9 mars 1839, puis du 25 avril 1842 au 9 mai 1847), Atala a été conservé jusqu’à sa mise en vente publique, en octobre 2013, dans le château des descendants de l’homme politique.
L’innocence n’étant jamais très éloignée de la volupté chez Chateaubriand, les paroles mises par l’écrivain dans la bouche du narrateur, Chactas, semblent avoir guidé le pinceau de Girodet :
« […] ses pieds, sa tête, ses épaules et une partie de son sein étaient découverts. (…) Ses lèvres, comme un bouton de rose cueilli depuis deux matins, semblaient languir et sourire ; Dans ses joues d’une blancheur éclatante, on distinguait quelques veines bleues. Ses beaux yeux étaient fermés, ses pieds modestes étaient joints, et ses mains d’albâtre pressaient sur son cœur un crucifix d’ébène (…). Elle paraissait enchantée par l’Ange de la mélancolie, et par le double sommeil de l’innocence et de la tombe. Je n’ai rien vu de plus céleste. Quiconque eût ignoré que cette jeune fille avait joui de la lumière aurait pu la prendre pour la statue de la Virginité endormie. »
Le détail choisi par le peintre illustre à merveille les rares reproches que fit la critique à l’encontre de son chef-d’œuvre, à savoir d’avoir représenté la jeune vierge de façon trop sensuelle, « pas assez morte ».
Repère chronologique de la vie de Chateaubriand : - Girodet, 1767-1824 . Paris, éditions, Gallimard, 2005. - Atala / François-René de Chateaubriand. Paris, 1801 Œuvres en rapport : 2016.3.1 Chactas, par A.-L. Girodet Rédacteur de la notice : Gisèle Caumont ; Date de rédaction : 21 juin 2016 |