Présenté au Salon de 1824 (n° 437) sous le titre La maison du Tasse telle qu’elle existe encore à Sorrente, ce tableau traduit à sa manière l’engouement que l’auteur de La Jérusalem délivrée suscita auprès des contemporains de Chateaubriand.
François Louis Dejuinne (Paris 1786 -Paris 12 mars 1844). La Maison du Tasse à Sorrente. 1824. Peinture à l'huile sur toile. 56 x 47 cm. Inv. 2010.3.1
Pour accentuer le caractère historique de la composition, Dejuinne y a représenté le Tasse contemplant la mer pendant que deux servantes lui apportent une collation et mêle de façon habile la scène de genre à la scène historique. La pénombre délicate qui entoure la scène est un souvenir du tour d'Italie qu’il effectua dans les années 1810.
Peintre d'histoire et de genre, Francois-Louis Dejuinne fut en 1803 élève de Girodet, et devint le maître de Pierre-Jules Jollivet. Il a obtenu le 2e prix de Rome en 1808 avec Erasistrate découvre la cause de la maladie d’Antiochus. Dejuinne réalisa plusieurs peintures pour le musée de l’histoire de France crée par Louis-Philippe au château de Versailles et peignit La chambre de Madame Récamier à l'Abbaye-aux-Bois (Paris, Musée du Louvre).
Le Tasse occupe une place particulière dans l’œuvre de Chateaubriand qui le place dans le groupe des « génies-mères » ; ces grandes figures de la littérature qui ont fécondé et fondé la culture de l’Occident ; la Jérusalem délivrée du Tasse surpassant à ses yeux l’Odyssée d’Homère car l’épopée italienne est habitée par le génie chrétien. Dans l’Itinéraire de Paris à Jérusalem, l’écrivain rappelle qu’il a visité Jérusalem en lisant cet ouvrage : « En achevant de décrire les lieux célébrés par le Tasse, écrit-il, je me trouve heureux d’avoir pu rendre le premier à un poète immortel le même honneur que d’autres avant moi ont rendu à Homère et à Virgile. Quiconque est sensible à la beauté, à l’art, à l’intérêt d’une composition poétique, à la richesse des détails, à la vérité des caractères, à la générosité des sentiments, doit faire de la Jérusalem délivrée sa lecture favorite ». Itinéraire de Paris à Jérusalem.
Mais le plus bel hommage rendu au poète italien se trouve dans le chapitre des Mémoires d’outre-tombe consacré à son ambassade à Rome, ville où Le Tasse est enterré : « Si j’ai le bonheur de finir mes jours ici, je me suis arrangé pour avoir à Saint-Onuphre un réduit joignant la chambre où le Tasse expira. Aux moments perdus de mon ambassade, à la fenêtre de ma cellule, je continuerai mes Mémoires. Dans un des plus beaux sites de la terre, parmi les orangers et les chênes verts, Rome entière sous mes yeux, chaque matin, en me mettant à l’ouvrage, entre le lit de mort et la tombe du poète, j’invoquerai le génie de la gloire et du malheur ». Mémoires d’outre-tombe, livre XXX, chapitre 13.
Repère chronologique de la vie de Chateaubriand : Bibliographie : Œuvres en rapport : Rédacteur de la notice : Olivier Grinhard ; Date de rédaction : Octobre 2016 |