Du 25 mai au 10 juin 2021, la biennale littéraire Victor Hugo a été l'occasion de (re)découvrir l'écrivain à travers des conférences, spectacles, tables rondes, lectures. Co-commissariat : Jean-Marc Hovasse et Bernard Degout.


Quelle que soit la profondeur de la relation au silence de la solitude qui y préside, aucune œuvre ne peut être arrachée à un héritage, aux enjeux de son époque, aux créations de ses contemporains. Celle de Chateaubriand ne fait pas exception. Elle ne fut pas plus indifférente au monde que celui-ci ne le fut à elle.

Les Biennales littéraires de la Vallée-aux-Loups en prennent acte. Elles invitent à arpenter le paysage de son œuvre, y faire résonner des échos, identifier des courants plus larges qui la travaillent, sonder l’ambivalence de certaines hostilités, esquisser des parallèles, discerner des lignes de fuite, mettre en évidence des contrastes pour mieux souligner tel ou tel aspect…

Après Shakespeare, Goethe et Byron, cette Biennale est consacrée à Victor Hugo. Il n’est pas besoin de présenter l’auteur de Notre-Dame de Paris, sauf à rappeler qu’il entretint avec Chateaubriand, son aîné mais son contemporain, une relation particulière qu’on ne bornera qu’à tort à quelques mots trop célèbres : « Je veux être Chateaubriand ou rien » ; « Je m’en vais, monsieur, et vous venez ».

La forme de ces Biennales, proposées par une maison d’écrivain hospitalière, se veut amicale, ouverte, accueillante. La musique, le théâtre, le cinéma, des conférences de spécialistes, des tables rondes s’y entremêlent, dans une programmation établie en concertation avec Jean-Marc Hovasse. Chateaubriand nous pardonnera d’en emprunter la formule, précisément, à Victor Hugo : « Tout pour tous ».

Concernant aussi bien la vie littéraire que la vie politique au sens large, les conférences et les tables rondes, réunissant les meilleurs spécialistes dans leurs domaines, couvrent quatre grands axes : Victor Hugo face à l’Histoire (de Napoléon à la Commune de Paris) ; Victor Hugo à l’œuvre (poésie, roman, théâtre) ; Victor Hugo et les arts (les dessins, mais aussi l’art populaire et le cinéma) ; enfin l’amitié, l’amour et la nature.

À côté du « Musée populaire de Victor Hugo » exposé dans la bibliothèque, plusieurs spectacles sont au programme : Le Mystère Esmeralda, adapté de Notre-Dame de Paris et mis en scène par Mickaël Soleirol, interprété par Florence Gaussen et Rémi de Monvel ; une lecture spectacle à deux voix de la pièce de Danièle Gasiglia-Laster « Être Chateaubriand ou Victor Hugo » ; un concert inédit de mélodies françaises sur des poèmes de Victor Hugo par la soprano Camille Poul accompagnée par Fériel Kaddour ; une projection présentée de l’Histoire d’Adèle H. de François Truffaut ; une lecture inédite de Fabrice Luchini : « Hugo, Baudelaire… ».

Non content d’héberger la Biennale dans sa maison, Chateaubriand est régulièrement présent dans ce programme, en raison de sa relation à Napoléon comme à Victor Hugo. Les grands anniversaires de l’année ne sont pas oubliés non plus, qu’il s’agisse des cent cinquante ans de la Commune célébrés pour ainsi dire en direct, puisqu’elle s’est achevée le 28 mai, des bicentenaires de la naissance de Baudelaire (9 avril) et de Flaubert (12 décembre), et enfin du bicentenaire de la mort de Napoléon le 5 mai.

 

 

Ouverture de la Biennale 

 

 

« Le musée populaire de Victor Hugo, ou Le Temple de l’idole » 

Conférence de Vincent Gille

Genèse de la collection et tentative de description des objets populaires réunis par Paul Beuve, intégrés dès 1902 dans le parcours de la Maison de Victor Hugo.

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« Victor Hugo et les femmes »

Conférence de Danièle Gasiglia-Laster

Influencé par l’image de la femme idéale telle qu’on la conçoit au XIXe siècle, mais ramené à la réalité par une société misogyne, Hugo réhabilite dans son œuvre les femmes les plus marginales, celles que ses contemporains méprisent. On se plaît à lui attribuer quantité de conquêtes féminines mais il n’est ni Don Juan ni Casanova. Il a profondément aimé les femmes de sa vie, qui ont alimenté, chacune à sa manière, la bouleversante humanité de plusieurs de ses personnages féminins et ont probablement contribué à son combat politique pour les droits des femmes.

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« Peint par lui-même : les “cartes de visite” de Victor Hugo »

Conférence de Pierre Georgel

« Peint par lui-même » : s’agissant de Hugo, l’expression est à prendre à la lettre car elle correspond à une réalité, celle d’un écrivain qui est aussi un dessinateur et recourt donc, en sus de l’écriture, à son second mode d’expression, le dessin, pour penser en général et se penser en particulier. Se penser en peintre, sans la médiation du langage, sans les détours de la pensée discursive ; figurer son moi par les moyens des arts visuels, qu’ils soient de l’ordre de la forme – lignes, couleurs, matières, agencement de l’espace…, toutes choses parlant directement à la sensibilité – ou de ce qu’on qualifie tant bien que mal d’iconographie. Ainsi des « cartes de visite » qu'il envoyait de son exil à des amis chers restés en France. Façon pour l’absent de rendre visite à ceux dont il était séparé, de leur parler de ses idées, de ses impressions, de ses sentiments – solitude, souffrance, nostalgie, ou tout au contraire ardeur, résolution, pugnacité, ou encore sérénité, exploration rêveuse du mystère…

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« Hugo et Flaubert racontés par leur amie anglaise : les Souvenirs de Gertrude Tennant »

Conférence de Florence Naugrette

Gertrude Tennant (1819-1918), Anglaise romantique, francophile et francophone, a été l’amie de jeunesse de Flaubert, et a rencontré Hugo à plusieurs reprises, à Paris, dans les années 1830, puis à Guernesey au moment de la publication des Misérables. Dans ses souvenirs littéraires, on découvre Flaubert et Hugo comme elle les a vus : le premier jeune, sauvage, beau, méprisant les convenances, adorant sa mère et sa sœur, passionné par la littérature, l’art et la beauté, déclamant du Hugo sur la plage de Trouville ; le second adulé par son entourage, attentif à son image, poli et froid à Paris, puis transfiguré par l’exil, séduisant, imprévisible, bienveillant avec les enfants, s’enflammant dans les discussions littéraires et politiques.

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« Chateaubriand et Victor Hugo face à Napoléon »

Table ronde avec Guy Rosa, Bernard Degout, Jean-Marc Hovasse

« Toujours lui ! lui partout ! », écrit Victor Hugo dans un vers célèbre des Orientales consacré à Napoléon, mort le 5 mai 1821. Chateaubriand, Napoléon, à commencer par le Napoléon de Chateaubriand, ont été les deux grandes obsessions de sa jeunesse, puis d’une bonne partie de sa vie. Cette table ronde interrogera cette relation à trois, à partir des textes principaux, essais, poèmes et roman (Les Misérables).

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« Les Misérables après Les Misérables (1862-1874) »

Conférence de Pierre Laforgue

Comment Hugo n’a cessé de récrire Les Misérables de 1862 à 1874, avec, entre autres, William Shakespeare, Les Travailleurs de la mer, Les Chansons des rues et des bois, Mille Francs de récompense et L’Intervention, jusqu’à Quatre-vingt-Treize.

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« Les dessins du crépuscule »

Conférence de Gérard Audinet

Apparu dans une simple notation au détour d’une lettre de voyage en 1837, le thème du crépuscule semble prendre de l’importance et accompagner l’œuvre graphique de Victor Hugo dans un moment décisif de son développement. Le crépuscule semblerait susciter une cristallisation du sentiment esthétique et poétique impliquant à la fois l’écriture et le dessin, dont elle amènerait, peut-être, à repenser les rapports.

 
 
 

« La construction du souvenir dans Les Contemplations »

Conférence de Ludmila Charles-Wurtz

On est parfois tenté de lire Les Contemplations comme une forme d’écriture de soi. Pourquoi pas ? Victor Hugo y fait allusion à certains éléments de sa vie, la mort de sa fille, l’exil. Mais le recueil est poétique et a recours à tous les artifices de la fiction : les poèmes ne se bornent pas à transcrire des souvenirs, ils les construisent. C’est à cette fabrique du souvenir que nous nous intéresserons ici, à partir de l’exemple d’un poème particulier, « Ô souvenirs ! printemps ! aurore ! » (IV, 9).

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« Victor Hugo et l’imaginaire du masque »

Conférence de Delphine Gleizes

Cette conférence se propose de parcourir l’œuvre littéraire et graphique de Victor Hugo en y déclinant les multiples présences du masque. Très tôt, l’imaginaire du masque se trouve lié aux miroitements du carnaval et de la théâtralité. Il reflète, au-delà du cas hugolien, la redécouverte par le romantisme de la Commedia dell’Arte et de sa force de subversion intempestive. Le masque est également associé dans ce contexte à l’autoreprésentation des artistes, qui se rêvent en saltimbanques (J. Starobinski), menant une vie de bohème faite de liberté et de fantaisie mais le plus souvent réduite à la précarité. En outre, par son pouvoir d’expressivité sch

ématique, par sa plasticité, le masque synthétise à lui seul bien des aspects de l’esthétique hugolienne, qui a fait, dans ces années marquées par la préface de Cromwell, de la promotion du grotesque l’un de ses chevaux de bataille. Pourtant, dès les origines, la présence du masque révèle bien des complexités dans l’œuvre de l’écrivain. S’il est associé au plaisir tout à la fois léger et mélancolique des Fêtes galantes qui, pour Hugo comme pour d’autres à son époque, consonnent avec l’évocation de la jeunesse et des « amours enfantines », le masque trahit surtout les inquiétudes qui hantent le poète : en s’affirmant tout autant par sa capacité d’occultation que par son pouvoir de monstration, le masque devient un expédient du mal social et une allégorie du mal métaphysique. Hugo aime à jouer de la discordance entre l’être et l’apparaître qui ouvre la voie pour lui à de profondes réflexions philosophiques. « La réalité c’est l’âme. À parler absolument, notre visage est un masque. […] L’erreur commune, c’est de prendre l’être extérieur pour l’être réel. » (Les Travailleurs de la mer, I, III, 1.)

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L'Histoire d'Adèle H.

Film de François Truffaut ; présentation par Jean-Marc Hovasse

En 1863, Adèle Hugo traverse l'Atlantique et débarque incognito à Halifax, au Canada. La fille cadette du célèbre écrivain a fui sa famille pour retrouver le lieutenant Pinson dont elle s'est éprise. Celui-ci, aussi volage que peu déterminé à l'épouser, repousse ses avances. La jeune femme se met alors à le suivre dans les rues, à l'espionner, lui propose de l'argent et même une prostituée. Étouffée par le poids de sa famille, consumée par sa passion, Adèle perd peu à peu la raison.

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« Hugo, Le Rappel, la Commune »

Conférence de Franck Laurent

Les positions de Victor Hugo et celles de « son » journal quotidien, Le Rappel (fondé et dirigé par ses deux fils et ses amis), ne sont pas toujours identiques. On tâchera de situer et d’analyser leurs divergences assez notables face à la Commune de Paris, pendant et après l’événement.

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« Le personnage de Claude Frollo à l’écran »

Conférence-projection avec présentation cinématographique d'extraits commentés, par Arnaud Laster

Confronté à la censure lorsque Hugo a adapté lui-même Notre-Dame de Paris en livret d’opéra, il n’a cessé de l’être lorsque son roman a été porté à l’écran : du fait de la représentation d’un ecclésiastique rongé de désir. On verra comment les scénaristes ont traité le personnage et évité ou contourné la censure.

 
 

« Chateaubriand, Victor Hugo, jardins et botanique »

Table ronde avec Jean-Baptiste Hugo, Françoise Chenet, Bernard Degout

Le cadre et la saison de cette Biennale incitent pour la conclure (ou ne pas la conclure) à interroger le rapport à la nature de Chateaubriand et de Victor Hugo, et plus précisément leur intérêt commun pour la botanique, leurs conceptions peut-être antithétiques des jardins. À cette occasion sera présenté l’incroyable herbier (Herbarium Hugonense), récemment découvert, fabriqué par Jean Hugo à partir des œuvres de son arrière-grand-père : de l’abricotier à l’ypréau en passant par l’oignon et la sensitive, il compte près de cinq cents entrées sur presque neuf cents pages.

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« Biblio-expo : Chateaubriand et Victor Hugo : parodies et objets dérivés »

Conférence de Pierre Téqui 

Cette conférence se place dans le cadre de la biblio-expo présentée dans la bibliothèque de la maison de Chateaubriand. A cette occasion, la Maison de Victor Hugo prête deux lettres de Chateaubriand, un portrait dessiné de Chateaubriand par Victor Hugo et trois pages manuscrites d'Adèle Hugo pour son ouvrage Victor Hugo raconté par un témoin de sa vie.  

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Un après-midi romantique à la Maison de Chateaubriand, dans le cadre des Musicales de la Vallée-aux-Loups

Dimanche 23 mai 2021, le Domaine départemental de la Vallée-aux-Loups accueillait le concert "Un après-midi à l'opéra" dans le cadre des Musicales de la Vallée-aux-Loups. L'événement marquait aussi l'ouverture de la biennale Victor Hugo de la Maison de Chateaubriand. En présence de Georges Siffredi, président du Département des Hauts-de-Seine, le programme faisait la part belle aux poèmes de Victor Hugo et à la musique allemande.